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Mythes relativement aux activités sexuelles antérieures (art. 276 C. cr.): la Cour du Québec remet les pendules à l’heure pour un adolescent

« Une plaignante n’est pas plus susceptible d’avoir consenti à une agression alléguée en raison de ses activités sexuelles passées. Elle n’est pas un témoin moins crédible parce qu’elle a déjà consenti à de telles activités ».

Voici la manière dont la juge Annick Bergeron de la Chambre de la jeunesse résume un des mythes d’activités antérieures sexuelles dans une décision récente concernant l’application de l’article 276 du Code criminel dans un dossier où un adolescent est accusé d’agression sexuelle.

Par sa requête, l’adolescent cherchait à contre-interroger la plaignante sur ses comportements sexuels antérieurs, notamment sur la portée de sa relation antérieure avec elle où elle aurait déjà consenti à des activités sexuelles avec lui.

Or, le Code criminel ne permet pas ce type de contre-interrogatoire, car il perpétue des mythes reliées aux activités sexuelles antérieures, soit:

  1. Que la plaignante serait plus susceptible d’avoir consenti à l’activité sexuelle; ou
  2. Qu’elle serait moins digne de foi;

Certaines exceptions sont reconnues, notamment dans le cas d’une défense de croyance sincère de l’accusé que la plaignante consentait aux activités sexuelles. Ceci étant, cette croyance doit être vraisemblable et doit être fondée sur la façon dont la plaignante a communiqué son consentement. La juge Bergeron s’exprime ainsi:

[19]      Dans l’arrêt Goldfinch, la Cour suprême précise que « la croyance sincère mais erronée ne peut pas simplement reposer sur la preuve que la personne a donné son consentement à un « moment donné » dans le passé : il s’agirait d’un raisonnement fondé sur les deux mythes. Par définition, la défense doit se fonder sur une preuve de la façon dont la plaignante a antérieurement communiqué son consentement pour que l’accusé puisse adéquatement étayer sa croyance à un consentement exprimé. »

La juge conclut que rien dans la preuve ne concernait la façon dont la plaignante avait donné son consentement dans le passé. Le Tribunal n’a pas à connaître le contexte de la relation entre les deux adolescents pour évaluer la crédibilité des témoins. Par ailleurs, la juge précise, à l’instar de la Cour suprême dans Goldfinch, que la simple assurance dans la procédure que la défense n’a pas l’intention d’utiliser la preuve pour étayer un des deux mythes est insuffisante.

Il est commun de constater que les mythes et croyances en matière d’agressions sexuelles sont encore répandu.es (nous vous en parlions d’ailleurs ici l’an dernier) autant dans la société que devant les tribunaux. L’application de l’article 276 C.cr. est primordiale afin de garantir le droit à la dignité et la vie privée d’une plaignante et de ne pas décourager les dénonciations en matière d’agression sexuelle.