Archives d’auteur : Me Marie-Aimée Beaulac

Revue médiatique, automne 2023

Une étude de la professeure Isabelle Fortin-Dufour est résumée dans cet article intitulé « La prison, «l’école du crime» pour les jeunes contrevenants » :

L’incarcération devrait être le «dernier recours» pour les contrevenants de 18 à 25 ans, selon une chercheuse de l’université Laval. Plus un criminel est jeune lorsqu’il quitte un centre de détention, plus il a de chances de retourner derrière les barreaux, démontre son étude.
[…]
Des études en neurosciences ont démontré que le développement du cerveau se poursuit jusqu’à l’âge de 25 ans, «en particulier dans les domaines du raisonnement fondé sur le jugement et du contrôle des impulsions», fait valoir Mme Fortin-Dufour.

Pourtant, le système de justice pénale de s’est pas adapté à cette réalité, déplore-t-elle. À 18 ans, un contrevenant est tenu 100 % responsable de ses actes devant la loi.
[…]
Isabelle Fortin-Dufour note que les récidivistes sont souvent célibataires. «Le fait de ne pas avoir d’attache amoureuse dans la communauté fait que certains reviennent pratiquement un an plus vite que ceux qui sont en couple», précise la chercheuse.
Parmi les autres facteurs de risque de récidive figurent les problèmes de consommation d’alcool et de drogue, les bas niveaux d’éducation et les difficultés à maintenir un emploi.
La gravité de l’infraction commise influence également le probabilité de retourner en prison. Selon Mme Fortin-Dufour, les personnes qui ont commis une offense plus violente, comme une agression ou une agression sexuelle, sont plus susceptibles d’être récidivistes.

En octobre dernier a eu lieu la diffusion du documentaire percutant « Ados et armé», animé par monsieur Fabrice Vil et toujours disponible sur Télé-Québec. Le Devoir commente ainsi:

Le nouveau documentaire Ados et armés décortique cette réalité troublante au Québec qu’est la hausse de la violence chez les jeunes qui s’affichent arme au poing. Avec les explications pertinentes et les pistes de solutions offertes par les experts, l’une des forces indéniables de cette réalisation télévisuelle est d’avoir trouvé ces jeunes, qui sont rarement entendus, et de leur avoir donné la parole pour qu’ils nous relatent dans leurs mots comment et pourquoi ils se sont procuré des armes à feu.
[…]
L’équipe de réalisation a voulu faire une grande place aux jeunes. « Donnons-leur le porte-voix : qui sont-ils, d’où viennent-ils et pourquoi se sont-ils armés ? » fait-elle valoir. Ce qui n’était pas une mince tâche, reconnaît-elle. En effet, comme l’annonce d’emblée la narration du documentaire : « La voix des jeunes est importante, mais la loi du silence est forte. » Il a fallu établir des liens de confiance, dit-elle. « Ça s’est fait sur plusieurs mois. » Malgré cela, plusieurs se sont désistés, craignant pour leur sécurité.
Et puis, pour que le documentaire « parle réellement aux jeunes », il fallait que ce soit d’abord et avant tout des jeunes qui expliquent la violence armée, souligne la scénariste, qui se dit « ravie qu’ils se soient livrés sans compromis », y compris en parlant de leur passé criminel.

L’adolescent accusé du meurtre du jeune Jannai Dopwell survenu en 2021 a été déclaré coupable la semaine dernière. Une vidéo de l’accusé célébrant le meurtre avait circulé sur les réseaux sociaux. La Couronne a annoncé son intention de demander une peine pour adultes. Plus d’infos ici.

Le centre de réadaptation Cité-des-Prairies vu par une journaliste

Tel qu’indiqué dans l’article portant sur le départ à la retraite de madame Thérèse Boucher, on vous parle d’un reportage publié sur Urbania, où la journaliste Rose-Aimée Automne T. Morin dresse un parcours des adolescents sous garde à Cité-des-Prairies, un centre de réadaptation qui offre 84 places en LSJPA.

La plupart du temps, on parle de multirécidivistes qui sont bien enclenchés dans la délinquance ou implantés dans un milieu de vie criminalisé. -Thérèse Boucher, coordonnatrice Jeunes contrevenants, CCSMTL

On y apprend que les filles ne forment que 10 à 15 % de la « clientèle» en jeunes contrevenants; en fait, plus le crime est grave, moins il est probable qu’un fille l’ait commis.

Je demande des précisions sur la clientèle. Selon Thérèse, on parle surtout de récidivistes qui ont commis un crime violent : vol qualifié, agression armée, réseau criminalisé, etc. À Cité-des-Prairies, ils ont en moyenne 17 ans et restent généralement entre 9 mois et un an. Parfois trois. Durant leur sentence, ils vivent soit en garde ouverte, soit en garde fermée. 

Le tour des lieux est abordé: d’abord les unités de garde ouvertes et fermées, la salle de retrait. Chaque adolescent a sa propre chambre et les aires communes sont fournies et comportent des items comme une table de babyfoot. La journaliste explique l’horaire auquel les adolescents sont soumis (école, repas, ménage, activité déterminée, etc.).

La journaliste dresse également le portrait des adolescents récidivistes, suivant une étude du professeur Denis Lafortune:

Les jeunes à risque plus élevé de récidive sont des garçons, assez jeunes au moment de leur premier délit officiel, plus souvent auteurs d’une infraction contre les biens, issus de milieux socioéconomiques défavorisés, présentant des antécédents de prise en charge et pour qui la première mesure appliquée n’était pas une SEJ [sanction extrajudiciaire].

On peut également ressentir la fierté de Mme Boucher pour l’angle québécois au niveau de la LSJPA.

Pour lire l’article au complet, c’est ici.

40 ans de savoir quitteront bientôt le réseau

1980

C’est l’année où madame Thérèse Boucher, coordonnatrice jeunes contrevenants (JC) au CIUSSS Centre-Sud-de-l’Ile-de-Montréal et membre de l’équipe de soutien provincial LSJPA, volet clinique, a été engagée pour faire l’évaluation de jeunes faisant l’objet d’accusations criminelles, et ce, afin de déterminer si des mesures de rechanges pouvaient leur être imposées. Elle avait à ce moment en poche son diplôme de technique en travail social. Et depuis, elle a consacré sa carrière aux jeunes contrevenants. Mme Boucher prendra sa retraite le 22 septembre prochain. Avec elle, partiront 40 ans de savoir et d’expérience accumulés au gré des années.

Suivant son poste à l’évaluation des jeunes faisant l’objet d’accusations criminelles, elle a travaillé au centre de réadaptation Cité-des-Prairies, où elle dispensait des services sociaux en institution à des jeunes hébergés. Elle a ensuite été déléguée jeunesse dans les années 90, avec une pause d’une année où elle a travaillé comme intervenante à Trajet jeunesse. Au début du nouveau millénaire, Mme Boucher a terminé un baccalauréat en travail social, ainsi qu’une maîtrise en gestion. En 2013, elle est revenue à Cité-des-Prairies pour y occuper des postes de gestion. Depuis 2016, elle occupe les fonctions de coordonnatrice jeunes contrevenants.

Au travers les années, elle a donc assisté à l’adoption de la Loi sur les jeunes contrevenants, puis de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. Elle a retravaillé le continuum de services JC dans le cadre de la réforme Barette, plus spécifiquement en lien avec la fusion des établissements. Elle a collaboré avec Boscoville pour bonifier les pratiques des intervenants (programme Lotus), participé à l’ajout du volet clinique à l’offre de soutien provincial LSJPA et a travaillé auprès de comités provinciaux pour mettre en place les orientations des directeurs provinciaux, notamment suivant l’adoption du projet de loi C-75.

Certains programmes l’ont particulièrement marquée; le programme « En route », développé avec la collaboration financière de la Fondation québécoise des Jeunes contrevenants, qui prévoit des ateliers thématiques en garde fermée en partenariat avec un organisme communautaire, ainsi que le programme «Intervention rapide en délinquance», avec l’introduction du levier « entretien motivationnel » dans la mobilisation des jeunes et de leurs parents.

Regard sur les lois

Mme Boucher se souvient avec nostalgie de la Loi sur les jeunes contrevenants, qui à son sens offrait davantage de perspectives pour répondre aux besoins des jeunes. Elle permettait d’appliquer la bonne mesure au bon moment. Pour elle, la LSJPA se centre davantage sur le délit et dans certains contextes, s’éloigne des besoins spécifiques du jeune. Avec l’arrivée de la LSJPA en 2003, les directeurs provinciaux et les partenaires socio-judiciaires du Québec ont travaillé fort pour maintenir leur vision développée au cours des deux décennies précédentes. Au fil des années, avec le changement de personnel et le départ des acteurs qui appliquaient la LJC, elle a observé qu’une application plus intégrale de la LSJPA s’est progressivement installée.  Elle constate également que, graduellement, des pratiques sur le terrain font perdre certaines distinctions entre le système adulte et adolescent (négociation du plaidoyer, renonciation au RPD, etc.).

Malgré tout, madame Boucher porte un regard positif sur le système de justice pénale pour les adolescents qui est en place présentement, en ce qu’elle estime qu’au Québec, on s’est doté d’une belle vision de la LSJPA.

Regard sur le futur

La coordonnatrice considère que l’on doit s’adapter à la nouvelle réalité (armes à feu, réseaux sociaux, etc.), et ce, en collaboration avec les partenaires.

L’exigence de travailler en partenariat, c’est essentiel : construire ensemble. Il faut être en mesure de travailler en cohérence dans les divers services qui sont offerts – il faut que les actions soient cohérentes et qu’on avance tous ensemble vers les nouvelles problématiques.

Dans une utopie avec des ressources illimitées, Mme Boucher souhaiterait:

  • créer un beau centre de jour où les jeunes pourraient être accueillis pour soutenus et accompagnés dans différentes démarches;
  • transformer les unités de vie pour qu’elles soient attrayantes, mais toujours sécuritaires;
  • une ressource spécifique aux JC pour les accueillir comme milieu de vie volontaire après une peine.

Quelques mots aux futurs / nouveaux intervenants:

Pour s’épanouir dans ce domaine, il faut être capable de voir le jeune derrière le délit: voir l’être humain, le potentiel, sa réalité. Il faut croire en la deuxième chance et en une société meilleure. Chaque jeune réhabilité, c’est un gain pour la société, c’est une économie sociale. Il faut croire qu’on sème des graines, même si parfois les résultats viennent beaucoup plus tard. Il faut être fier de la cause: notre approche est belle et bonne; il faut être en mesure de la porter.

À ce sujet, elle nous réfère à un article publié sur Urbania dont on vous parle sous peu!

Cet article a été écrit en collaboration avec Me Laurence Beaudoin.

Revue médiatique, printemps 2023

  • Le directeur général d’Équijustice Saguenay, monsieur Mario Allard, parle de l’importance de la justice réparatrice pour les jeunes contrevenants. Son organisme travaille notamment sur le fait de convaincre les victimes de participer au processus. L’article met de l’avant une thérapie pour les adolescents ayant commis des infractions sexuelles. À lire ici.
  • Un jeune adulte présente son parcours de réadaptation via la LSJPA. Il exprime que la réhabilitation est un long processus, qui a pris plusieurs mois à s’enclencher pour lui. À lire ici.
  • Dans le nord-ouest de l’Ontario, un centre de justice autochtone souhaite offrir une solution de rechange au système judiciaire pour les jeunes Autochtones. L’organisme mise sur la guérison et se concentre sur les cas de jeunes de 12 à 24 ans. Plus d’infos ici.

IUJD sur YouTube – Journée LSJPA et autres vidéos

L’Institut universitaire Jeunes en difficulté est très actif sur YouTube, où on retrouve notamment les présentations offertes lors de la journée LSJPA De la théorie à la pratique, en 2023 et 2022.

Cette thématique est organisée dans une liste de lecture, ce qui en simplifie le visionnement. Les présentations portent notamment sur l’évaluation du risque à la Chambre de la jeunesse, les bonnes pratiques et les défis rencontrés dans l’application de la LSJPA, le traitement judiciaire en vertu de la LSJPA au cours des dernières années, et plus encore.

Outre cette liste de lecture, on retrouve également des listes portant sur le projet SPHÈRES, d’autres conférences offertes par l’IUJD et une activité clinico-scientifique portant sur l’exploitation sexuelle.

Une mine d’informations!

Radio-Canada enquête sur les fouilles complètes en centre de réadaptation

Dans un article paru le 24 avril dernier, Radio-Canada expose des statistiques liées aux fouilles complètes survenant en centre de réadaptation.

Une fouille complète est généralement effectuée à la demande d’un intervenant jeunesse, avec l’autorisation d’un superviseur. Divers motifs peuvent être invoqués, comme la possible possession de drogue, d’une arme ou d’un objet qui pourrait représenter un danger pour le jeune ou pour autrui.

Lors de la fouille, qui se fait dans un lieu en retrait, deux adultes doivent être présents, dont au moins un du même sexe que le jeune.

Le jeune doit alors retirer tous ses vêtements – y compris ses sous-vêtements – avant de se couvrir avec une robe de chambre ou une serviette. C’est à ce moment qu’il subit une inspection visuelle de certaines parties de son corps : aisselles, nuque, intérieur de la bouche, intérieur des mains, plante des pieds, etc. [*]

La nudité du jeune n’est toutefois jamais exposée aux adultes présents. En ce sens, la fouille complète ne peut pas être qualifiée de fouille à nu, une pratique interdite.

Le journaliste fait état des inquiétudes de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse concernant le nombre de fouilles survenant en centre.

Différents établissements expliquent par ailleurs que la façon de computer les fouilles peut être différente d’une région à l’autre. L’an dernier, plus de 5700 fouilles complètes ont été réalisées auprès de jeunes hébergés ou faisant l’objet d’une peine de placement sous garde en centre de réadaptation..

Par ailleurs, l’objectif des intervenants pour justifier ces fouilles est le même : la sécurité du jeune et des autres jeunes.

Pour lire l’ensemble du reportage, c’est ici.

* La pratique quant aux fouilles dépend d’une région à l’autre. Par exemple, dans certaines régions, l’adolescent peut garder ses sous-vêtements.

Conférence midi sur l’utilisation de la dérogation clinique

L’Institut universitaire des jeunes en difficulté vous propose la conférence suivante, le mardi 11 avril à 12h, en ligne:

Le système de justice canadien vise à favoriser la réinsertion sociale des jeunes contrevenants.es en leur offrant une intervention adaptée à leur niveau de risque et leurs besoins. Dans le cadre de cette prise en charge, ces personnes font l’objet d’au moins une évaluation de leur risque de récidive à l’aide du YLS/CMI. Cet outil offre la possibilité à l’intervenant de modifier le niveau de risque proposé, pratique appelée dérogation clinique. Le but de cette conférence-midi est de présenter l’état des connaissances accumulées depuis les dix dernières années sur cette pratique : sa fréquence d’utilisation, son impact sur la validité prédictive des instruments et les facteurs qui y sont associés. L’accent sera mis sur les travaux portant sur les jeunes contrevenants, bien qu’un détour chez les adultes soit nécessaire, et ce à partir, entres autres, de nos récents travaux sur la question (Guay & Parent, 2018; Parent et al., accepté). 

Présentée par Geneviève Parent (UQO)

Pour s’inscrire, c’est ici.

Revue médiatique, été 2022

En juin 2022, 7 jeunes, dont 6 mineurs, ont été arrêtés après une série d’épisodes d’intimidation violente dans la région de Québec. Les jeunes utilisaient notamment des fusils à plomb. Les événements ont débuté il y a plusieurs mois et des vidéos circulaient entre les adolescents de la région. Ils ont été accusés de harcèlement criminel et de port de déguisement dans un dessein criminel.

En août 2022, la Presse a publié un reportage sur le vécu des jeunes au Centre jeunesse de Laval. L’article aborde la prolifération des armes chez les mineurs, le manque de structure dans les réseaux délinquants et la nouvelle réalité des jeunes sur les réseaux sociaux.

Un jeune proxénète de Lévis, adolescent au moment des actes reprochés, risque une peine de six ans de prison. Le DPCP a exprimé souhaité une peine pour adulte sévère en raison de la gravité des gestes commis.

À Vaudreuil-Dorion, dans les derniers jours, un adolescent de 15 ans a poignardé un adolescent de 13 ans, faisant suite à une série d’événements semblables dans le grand Montréal.

Les nations autochtones et la LSJPA

En ce lendemain de la journée internationale des peuples autochtones, l’équipe de soutien LSJPA souhaite ouvrir le dialogue. Nous réfléchissons à organiser une journée de réflexions sur le processus LSJPA pour les communautés autochtones au printemps 2023 (une journée en anglais et une journée en français présentant le même contenu).

Vous êtes un délégué ou un OJA travaillant avec des communautés?

Vous êtes un délégué, chef de service, travailleur de communauté (community worker) autochtone qui souhaiterait s’impliquer dans l’organisation des journées?

Contactez-nous au courriel suivant : marie-aimee.beaulac.ccsmtl@ssss.gouv.qc.ca

Merci (français), Nakurmik (inuktitut), Chi naskumitin (cri), Mikwetc (atikamekw), Tshinashkumitin (innu)

Bilan DPJ DP 2021-2022

Le bilan des DPJ DP a été publié en juin dernier.

Quelques statistiques:

Nombre d’adolescents contrevenants qui ont reçu des services: 7 470 (81.1% garçons / 18.9% filles), soit une hausse de moins de 1% par rapport à l’année dernière.

Nombre d’adolescents contrevenants ayant été évalués et orientés: 2 912 (74 % garçons / 26 % filles)

Accomplissements des sanctions: 2 302 sanctions accomplies (94 % des ados ont accompli leur sanction)

Peines ordonnées durant l’année, impliquant le DP: 1 808 peines purgées dans la communauté (88.7% des garçons) et 182 peines comportant une mise sous garde (95.6 % des garçons)