Archives d’auteur : Me Laurence Beaudoin
La vidéo d’une poursuite policière sur l’autoroute Décarie à Montréal devient virale sur les réseaux sociaux
Le 7 janvier dernier, une impressionnante poursuite policière a eu lieu à Montréal à la suite d’un vol de téléphones dans un magasin de Granby. Les suspects ont été aperçus à bord de leur véhicule alors qu’ils étaient de retour sur l’île de Montréal.
La poursuite policière, qui a eu lieu en plein jour et qui s’est terminée sur l’autoroute Décarie, a été filmée par un citoyen. La vidéo a été publiée le 15 janvier dernier sur la plateforme Tiktok et elle compte à ce jour plus de 12 millions de vues.
On y voit les suspects prendre la fuite à pied, alors qu’ils sont pourchassés par une policière qui tente en vain de maîtriser l’un des individus.
Ceux-ci ont finalement été arrêtés un peu plus loin. L’un des suspects est d’âge mineur et il a été libéré suite à son arrestation. Les suspects font notamment face à des accusations de vol qualifié et de conduite dangereuse.
Pour davantage de détails et pour visionner la vidéo en question, rendez-vous ici.
91 ans après son exécution, un adolescent noir est innocenté
Le 3 octobre 1930, un adolescent noir de 16 ans, Alexander McClay Williams, est accusé d’avoir assassiné une responsable blanche de la Glen Mills School for Boys en Pennsylvanie, un centre de détention pour jeunes délinquants. L’adolescent, qui purgeait alors une peine de détention dans cette école de réforme, signe à trois reprises des aveux au cours de cinq interrogatoires distincts lors desquels il subit des abus physiques et n’est pas assisté d’un avocat.
L’adolescent est accusé alors qu’aucune preuve directe ne le relie au meurtre de la dame. L’avocat assigné ultérieurement au dossier de l’adolescent est William Ridley, le premier avocat afro-américain du barreau du Comté de Delaware en Pennsylvanie. Celui-ci ne dispose pas des ressources lui permettant de préparer le procès et la défense de son client. L’adolescent fait face à un jury entièrement blanc et plusieurs éléments de preuve qui auraient pu l’innocenter ne sont pas présentés lors du procès. Il est reconnu coupable en moins de quatre heures de délibéré.
Alexander McClay Williams est exécuté le 27 février 1931 et restera le plus jeune homme de l’histoire de l’État de Pennsylvanie à avoir subi la peine capitale.
Le 18 juin 2022, 91 ans après son exécution, Alexander McClay Williams a été innocenté par un juge de la cour du Comté de Delaware.
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Le crédit accordé pour le temps passé en détention provisoire
Dans l’affaire R. c. N.N., 2022 ONSC 1705, trois adolescents, N.N., K.H. et Y.N., doivent recevoir leur peine suite à des plaidoyers de culpabilité pour des accusations de meurtre au deuxième degré et d’homicide involontaire coupable.
Au moment de la perpétration de l’infraction, N.N., qui a plaidé coupable à une accusation de meurtre au deuxième degré, est âgé de 17 ans. Au moment de recevoir sa peine, il est âgé de 19 ans, ce dernier ayant passé un peu moins de 22 mois en détention provisoire.
K.H. et Y.N., qui ont plaidé coupables à une accusation d’homicide involontaire coupable, sont âgés de 16 et 15 ans au moment de la perpétration de l’infraction. Au moment de recevoir leur peine, ils sont âgés de 18 et 17 ans, ces derniers ayant passé respectivement 15 et 22 mois en détention provisoire.
Le ministère public et la défense s’entendent sur la durée des peines qui devraient être imposées aux adolescents, soit 7 ans dans la situation de N.N. et 3 ans dans la situation de K.H. et Y.N.
Le litige se situe plutôt sur la période que N.N. devrait purger sous garde. Plus spécifiquement, le ministère public propose une période à être purgée sous garde de quatre (4) ans, alors que la défense estime plutôt qu’elle devrait être de 3.5 ans. De plus, il y a litige sur la question du crédit que le tribunal devrait accorder pour le temps passé par les adolescents en détention provisoire. Le ministère public suggère un crédit de 1 :1, alors que la défense propose plutôt un crédit 1.5 :1.
Dans son analyse, le juge rappelle les objectifs et les principes de la détermination de la peine prévus à l’article 38 LSJPA. Il se penche également sur la question du temps passé en détention suite à la perpétration de l’infraction.
Le juge rappelle également les facteurs qu’il doit prendre en compte dans l’imposition d’une peine. Il dira que bien que la durée des peines ne soit pas en litige dans la présente affaire, l’objectif, les principes et les facteurs énoncés à l’article 38 LSJPA s’appliquent pour déterminer la période à être purgée sous garde par les adolescents, ainsi que le crédit à accorder pour le temps passé en détention provisoire.
L’alinéa 38(3)d) LSJPA oblige les tribunaux pour adolescents à prendre en considération le temps passé en détention provisoire. Toutefois, ils ne sont pas tenus de le déduire lors de l’élaboration d’une peine appropriée. Effectivement, ils jouissent d’une grande discrétion pour déterminer si un crédit doit être accordé et dans quelle mesure il devrait être accordé. Il ne s’agit pas d’une formule mécanique.
Dans la présente affaire, le Tribunal s’exprime de cette façon :
«[24] Subsection 38(3)(d) requires me to take into consideration the time spent in detention, but I am not required to deduct pre-sentence custody when crafting an appropriate sentence. Whether and to what extent credit is given for pre-sentence custody against a youth sentence is within a youth court judge’s discretion. The credit is not a mechanical calculation.
[25] My discretion must be exercised in a manner that serves the sentencing objectives and principles in the YCJA. »
Une peine imposée à un adolescent en vertu de la LJSPA doit être similaire à celles imposées pour des crimes similaires commis dans des circonstances similaires. Conformément à ce principe, le juge fait un survol de la jurisprudence en lien avec les peines imposées à des adolescents pour des crimes similaires. Il analyse ensuite la situation spécifique des trois adolescents.
Le juge expose les facteurs aggravants dans la situation des adolescents, notamment la gravité des crimes et les circonstances dans lesquelles ils ont été commis. Il retient néanmoins plusieurs facteurs atténuants, notamment l’absence d’antécédents judiciaires, leur soutien familial et leurs efforts de réhabilitation pendant la détention. Il retient également comme facteur atténuant les conditions de détention plus difficiles actuellement en raison la pandémie liée à la COVID-19. Conséquemment, le juge accorde un crédit légèrement supérieur à celui du 1 :1 proposé par le ministère public.
Ainsi, les peines suivantes sont imposées aux adolescents:
–Dans la situation de N.N. : Une peine de sept (7) ans, dont 3.5 ans à être purgés sous garde et 3.5 ans à être purgés en liberté sous conditions. Le juge lui accorde en plus un crédit de 27 mois pour un peu moins de 22 mois purgés en détention provisoire.
–Dans la situation de K.H. : Une peine de trois (3) ans, dont deux (2) ans à être purgés sous garde et un (1) an à être purgé en liberté sous conditions. Le juge lui accorde un crédit de 19 mois pour un peu plus de 15 mois purgés en détention provisoire.
–Dans la situation de Y.N. : Une peine de trois (3) ans, dont deux (2) ans à être purgés sous garde et un (1) an à être purgé en liberté sous conditions. Le juge lui accorde un crédit de 27 mois pour 22 mois purgés en détention provisoire.
«(En)Quête de criminologie – Balado»
«(En)Quête de criminologie est un balado de vulgarisation scientifique qui vise à démystifier certains thèmes classiques de la criminologie.» Des invités du milieu de la recherche et du milieu professionnel s’entretiennent avec l’animateur sur divers sujets et discutent des plus récentes connaissances pratiques et académiques en criminologie pour aller au-delà des mythes et des croyances populaires.
L’épisode 4 du balado traite du phénomène des gangs de rue et de la réalité des adolescents qui les composent. Pour cet épisode, l’animateur est accompagné de Sylvie Hamel, professeure au département de psychoéducation à l’UQTR et chercheure régulière au Centre international de criminologie comparée (CICC), ainsi que monsieur René-André Brisebois, praticien et chercheur à l’Institut universitaire Jeunes en difficultés (IUJD) du CIUSSS Centre-Sud-de-l’île-de-Montréal.
« Le Désistement assisté : La perspective des jeunes sur ce qui facilite (ou pas) leurs processus de désistement »
Le mardi 16 novembre 2021, se tiendra une conférence-midi en version web ayant pour sujet les études portant sur « le désistement assisté (DA) ». Ces études visent à mieux comprendre comment les divers intervenants impliqués aussi bien dans le milieu communautaire que dans le système de justice pénale pour adolescents ou adultes peuvent jouer un rôle dans le processus du «désistement du crime». Les résultats «issus de quatre projets sur le DA seront présentés» lors de cette conférence-midi.
Réservez la date – Journée des juristes LSJPA 2021
Quoi : 6 heures de formation de qualité en matière de justice pénale pour les adolescents
Quand : le 24 novembre 2021 de 8h30 à 16h30
Où : de manière virtuelle, par le biais de la plateforme numérique ZOOM
Combien ça coûte : 130 $ par personne
Comment s’inscrire : un lien sera partagé sur le blogue afin de procéder aux inscriptions par le biais d’une plateforme numérique sécurisée
C’est avec grand plaisir que l’Équipe de soutien LSJPA vous annonce que la 5e édition de la Journée des juristes LSJPA se tiendra le 24 novembre 2021.
Cette journée de formation juridique et clinique s’avère une occasion unique pour toute personne d’approfondir ses connaissances en matière de justice pénale pour les adolescents. Voici les sujets qui seront abordés au courant de cette journée :
- La revue de la jurisprudence récente en LSJPA, par Me Bruno Des Lauriers, avocat au CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal et Me Marie-Ève Garceau, avocate au CISSS Montérégie-Est;
- Proxénétisme à l’adolescence : mieux comprendre cette réalité en contexte de délinquance juvénile, par monsieur René-André Brisebois, coordonnateur professionnel au centre d’expertise de l’Institut universitaire jeunes en difficulté;
- Le sextage chez les adolescents : comprendre le phénomène et ses enjeux, par Me Louis-David Bénard, procureur au Bureau des affaires de la jeunesse au Directeur des poursuites criminelles et pénales de Saint-Jérôme et madame Sabrina Carbonneau, coordonnatrice en relations communautaires à la Sûreté du Québec;
- Les impacts de la pandémie sur le système de justice pénale pour les adolescents au Canada, par Me Sandra Couture, avocate au Ministère de la Justice du Canada;
- La réhabilitation sous contrôle : Le suivi des jeunes contrevenants à l’épreuve de la gestion des risques, par monsieur Nicolas Sallée, professeur agrégé à la Faculté des sciences sociales de l’Université de Montréal;
Étant donné la situation sanitaire actuelle, cette journée ne pourra avoir lieu à l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal. Ainsi, pour une deuxième année consécutive, il sera possible d’assister aux formations de manière virtuelle par l’entremise de la plateforme numérique ZOOM.
La Journée des juristes LSJPA se déroulera de 8h30 à 16h30. Un montant de 130$ par personne devra être déboursé pour pouvoir participer à la formation.
Sachez que la 5e édition de la Journée des juristes LSJPA est en voie d’accréditation par le Barreau du Québec aux fins de la formation continue obligatoire pour les avocat(e)s pour un total de six (6) heures de formation.
C-75: CE QUE L’ON RETIENT
Le projet de loi C-75, loi modifiant le Code Criminel, la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents ainsi que d’autres lois, est entré en vigueur le 18 décembre 2019.
En matière LSJPA, ce projet de loi crée essentiellement trois nouveaux concepts, plus précisément :
– Il existe maintenant une présomption selon laquelle le recours aux mesures extrajudiciaires devrait suffire pour faire répondre l’adolescent d’une omission ou d’un refus de respecter une peine (art. 4.1 LSJPA). À noter que la présomption pourrait ne pas s’appliquer dans certaines circonstances, par exemple si l’adolescent omet de se conformer de manière répétitive à une peine.
– Il est maintenant possible pour le tribunal d’ajouter des conditions plus sévères à une peine de probation, soit pour assurer une meilleure protection du public ou encore pour permettre à l’adolescent de se conformer aux conditions préalables de la peine (art. 59 (10) LSJPA).
– Le tribunal a maintenant l’obligation de s’assurer que l’adolescent sera raisonnablement en mesure de se conformer à une condition avant de pouvoir l’ordonner (art. 29 et 38 (2) e.1) LSJPA). Afin d’évaluer si l’adolescent pourra raisonnablement se conformer à une condition, divers éléments devront être pris en compte par le tribunal. Par exemple, les capacités intellectuelles ou encore psychologiques de l’adolescent.
Un atelier sera offert à l’automne dans les divers établissements de la province pour approfondir ces concepts.
Le Grand Nord : la Cour itinérante de Kuujjuaq
Récemment, nous avons eu l’opportunité de discuter avec Jessie Bourgeois, déléguée jeunesse «dans le grand Nord ». On entend souvent cette expression quand des intervenants de régions australes acceptent un contrat « au Nord ». Mais dans les faits, qu’est-ce que cela signifie ?
Le « grand Nord » fait référence au Nunavik, ce vaste territoire s’étalant au-delà du 55e parallèle et comptant 14 villages. Les Inuit occupent principalement le territoire et parlent majoritairement l’inuktitut et l’anglais. Kuujjuaq est la plus importante communauté du Nunavik, dénombrant une population d’environ 2 700 habitants.
Le processus judiciaire, déjà très différent de ce qu’on retrouve dans les régions plus australes, est totalement changé dû à la pandémie.
Avant mars 2020, la Cour itinérante de la baie d’Ungava prenait place 1 ou 2 semaines par mois au palais de justice de Kuujjuaq ou dans les locaux des autres villages, par exemple dans un gymnase scolaire. Les dossiers LSJPA sont entendus les mêmes journées que les causes criminelles adultes. Les protagonistes de la Cour (juge, avocats de la défense, DPCP, traducteur) arrivent par avion le lundi midi et la Cour siège jusqu’au vendredi midi pour permettre aux gens de repartir vers le sud. Depuis plusieurs années, au niveau du DPCP, il n’y a plus de procureur basé à Kuujjuaq et ce sont des PPCP d’Amos qui se répartissent les dossiers. Quant au Directeur provincial, il est représenté par un bureau privé, plutôt que par des avocats à l’interne. De sa perspective de DJ, madame Bourgeois estime que, tout en respectant les principes édictés dans la LSJPA, la Cour itinérante est un processus où les acteurs s’efforcent d’être centrés sur les besoins des jeunes plutôt que sur l’aspect punitif.
Si un examen urgent doit être entendu, comme une suspension de surveillance, alors que la Cour ne siège pas, ce sera un juge en protection de la jeunesse qui entendra le dossier (leurs auditions se tenant lors de différentes semaines que les auditions en matière criminelle).
Évidemment, le contexte de la pandémie a amené l’ensemble des auditions à avoir lieu en virtuel, ce qui complexifie les choses qui n’étaient déjà pas simples.
Des infractions courantes dans sa charge de cas à titre de déléguée jeunesse sont par exemple des voies de fait, menace de causer la mort, agression sexuelle, utilisation négligente d’une arme à feu ou encore menace à l’endroit d’un agent de la paix.
Lorsqu’une peine de garde est ordonnée, elle sera purgée à Montréal pour les garçons (dans une unité de centre de réadaptation appartenant au Centre de santé Tulattavik) et à Prévost pour les filles (via un prêt de service avec le CIUSSS du Centre-Ouest-de-l’Île-de-Montréal).
La semaine prochaine, un article sera publié concernant plus spécifiquement la réalité terrain au Nunavik.
Développer de meilleures pratiques cliniques pour nos jeunes
Boscoville est un organisme à but non lucratif financé par le Ministère de la Santé et des Services sociaux. Leur mission : « Développer et promouvoir les meilleures pratiques de prévention et d’intervention psychosociale afin d’accompagner les intervenants du Québec dans leurs actions visant le développement optimal des jeunes. »
Au mois d’octobre 2020, Boscoville publie un rapport intéressant visant à mettre en lumière les meilleures pratiques à adopter par les intervenants oeuvrant auprès des jeunes contrevenants dans le but d’améliorer la prestation de services cliniques qui leur est offerte. Pour avoir accès au rapport entier, veuillez cliquer sur le lien suivant : https://www.boscoville.ca/wp-content/uploads/2020/10/20200908_Portrait-et-r%C3%A9flexions-sur-les-pratiques-li%C3%A9es-%C3%A0-la-diminution-du-risque-de-r%C3%A9cidive_VD-1.pdf
« Justice réparatrice pour les jeunes Autochtones »
Dans un rapport datant du mois d’août 2019 intitulé Indigenous youth restorative justice, la question de la surreprésentation des Autochtones dans le système de justice pénale canadien, et plus particulièrement celle des jeunes contrevenants autochtones soumis à la LSJPA, est analysée.
Ainsi, il est fait état que selon les données recueillies pour l’année 2016-2017, alors qu’ils ne représentent que 8% de la population canadienne pour le même groupe d’âge, 46% des jeunes faisant l’objet d’une peine criminelle en vertu de la LSJPA sont Autochtones.
Ce rapport explore certaines des causes de cette surreprésentation, par exemple l’héritage du colonialisme et l’impact des traumatismes intergénérationnels chez les populations autochtones.
Il fait également état du manque de confiance des jeunes issus des communautés autochtones envers le système de justice et les forces de l’ordre, alors que les services nécessaires pour assurer la prévention du crime et la réadaptation des jeunes contrevenants autochtones sont manquants ou inefficaces.
Finalement, le rapport fait état des bienfaits de la justice réparatrice, une approche bien établie dans le système de justice pénale pour les adolescents. Il est toutefois expliqué que la justice réparatrice telle qu’élaborée et pratiquée présentement dans la société répond davantage aux besoins des jeunes non racisés. Il est ainsi difficile de déterminer si les différents programmes mis en place s’avèrent efficaces pour les jeunes autochtones.
Conséquemment, suivant les recherches effectuées et les témoignages récoltés, différentes recommandations sont proposées. Par exemple, on suggère l’adoption de politiques et la mise en place de programmes visant la prévention du crime qui soient adaptés aux communautés autochtones, ainsi qu’une justice réparatrice axée sur la culture autochtone.